top of page
Des livres émoi !
  • Youtube
  • Facebook

Quand les déesses se lèvent..."Le rire des déesses", d'Ananda Dévi

  • Des livres émoi
  • 7 août
  • 2 min de lecture
Editions Grasset
Editions Grasset

Il y a des romans qui ne se contentent pas de raconter une histoire : ils élèvent une parole. Une parole qu’on n’entend pas, ou qu’on n’écoute plus. 


Le Rire des Déesses d’Ananda Devi fait partie de ces œuvres nécessaires. À la fois tragique et lumineuse, brutale et poétique, elle nous emporte dans un monde de contradictions où les femmes sont à la fois vénérées et bafouées.


L’intrigue se noue autour d’une jeune fille de treize ans, contrainte à vivre ce que nul enfant ne devrait connaître. Autour d’elle gravitent d’autres femmes : sa mère, épuisée mais tenace, une photographe occidentale venue capter l’ombre dans les regards, une religieuse en rupture avec l’institution, une sage transgenre qui incarne le mystère des marges. Ces femmes, que tout oppose, vont peu à peu tisser un fil invisible : celui de la solidarité, de la résistance, et d’une humanité que le monde semble vouloir leur dérober.


Ce qui est tu dans le roman est peut-être ce qui y pèse le plus lourd. On y sent les regards intrusifs, les gestes imposés, les corps traversés par des violences qu’on ne décrit pas, mais que l’on devine, dans les silences, dans les esquives, dans la pudeur même de l’écriture. Ananda Devi n’expose jamais frontalement, elle suggère. Et c’est peut-être cela qui est le plus bouleversant : ce qu’elle ne dit pas résonne plus fort que ce qu’elle pourrait écrire.


Loin de tout misérabilisme, elle nous offre une œuvre littéraire magistrale. Sa langue est à la fois sensuelle et acérée, lyrique sans être pompeuse, engagée sans jamais être démonstrative. Le récit est polyphonique, chaque voix creuse un sillon singulier, chaque personnage devient un miroir tendu au lecteur.



ree

Et puis, il y a ce rire. Le rire des déesses. Celui qui traverse le roman comme une onde sourde, qui vient des tripes autant que du ciel. Un rire irrévérencieux, peut-être sacrilège, mais profondément libérateur. Il ne célèbre rien — il défie. Il répond à l’oppression par la fureur, à l’effacement par la présence. C’est le rire de celles qu’on croyait soumises et qui, dans l’ombre, préparent leur renaissance.


Le Rire des Déesses est un texte politique, oui, mais il est avant tout profondément humain. Il interroge notre rapport au corps, à la foi, à la dignité. Il parle du pouvoir, de la domination, de la féminité dans tout ce qu’elle a de vulnérable… et d’indomptable.

Ananda Devi signe ici un roman rare. De ceux qui vous suivent longtemps, comme une voix intérieure, comme un secret partagé. Une œuvre puissante, pudique, essentielle.


Et ce rire… vous l’entendrez encore, bien après avoir refermé le livre.

Commentaires


bottom of page